Pour les TS spécialité, un article du Monde du 13.02.10
Pour le poète, la Terre est bleue comme une orange. Pour les géophysiciens qui s'intéressent à l'histoire du climat, elle s'apparente plutôt à une balle de tennis. A une sphère déformable sous la pression des calottes polaires, qui enflent et fondent cycliquement au fil des âges géologiques, selon l'inclinaison du globe par rapport au Soleil.
Quand ces calottes se retirent, la croûte terrestre continue à gonfler pendant des millénaires : c'est ce que les spécialistes appellent le "rebond hydro-isostatique postglaciaire", qui peut se traduire par une baisse apparente du niveau des mers. En fait, dans ces régions, ce n'est pas l'océan qui descend, mais la côte qui s'élève en se dilatant. C'est le cas actuellement dans certaines zones de Scandinavie ou du Canada, jadis ensevelies sous plusieurs kilomètres de glace, où cette surrection atteint 1 centimètre par an.
Ce phénomène est au coeur de la mesure de l'élévation du niveau des mers dû au réchauffement climatique actuel : il faut pouvoir distinguer ce qui dépend de la fonte des glaces, de la dilatation thermique des eaux et du rebond isostatique. Une étude iconoclaste, publiée vendredi 12 février dans la revue Science, montre que cet exercice mérite peut-être d'être révisé.
Jeffrey Dorale (université de l'Iowa) et ses collègues y présentent des analyses de stalactites trouvées sur l'île de Majorque suggérant qu'il y a 81 000 ans, le niveau de la mer était quasiment identique à celui d'aujourd'hui, voire un mètre au dessus. La surprise est de taille : la grande majorité des études portant sur cette période montre un niveau bien plus bas, entre 7 et 30 mètres sous le trait de côte actuel.
Les concrétions calcaires que l'on trouve dans les grottes des Baléares, à la limite entre eau douce et eau de mer, racontent donc une tout autre histoire. Quand on sait que 6 mètres de hauteur d'eau correspondent à la fonte de la calotte actuelle du Groenland, on saisit l'impact de cette nouvelle évaluation. Pour Jeffrey Dorale et ses collègues, la différence avec les autres études ne peut s'expliquer par le "rebond isostatique" qui, d'après les modélisations, serait beaucoup trop faible pour expliquer l'altitude des stalactites. D'autant plus qu'ils estiment que Majorque se situe dans une zone géographique très peu sensible à ce phénomène. L'explication tiendrait donc à une fonte rapide des glaces...
Hervé Morin
Article à retrouver dans son intégralité au CDI dans l'édition du Monde du 13.02.10
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire